La question de la prise en compte du temps de trajet des salariés itinérants au regard de la réglementation du temps de travail pose difficultés depuis de longues années dans les entreprises.
En droit français, depuis 2005, l’article L. 3121-4 du Code du travail a précisé la nature juridique du temps passé par un salarié à se déplacer pour se rendre à son travail et en revenir : « le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif ».
Mais cette définition renvoie à une notion de lieu habituel de travail. Elle n’est donc pas adaptée aux salariés itinérants qui n’ont pas de lieu de travail fixe (comme, par exemple, les technico-commerciaux, techniciens de maintenance sur site, les monteurs sur chantiers, etc.).
La question se pose donc de savoir si le temps de déplacement de leur domicile vers les différents lieux de travail, le matin et le soir, doit ou non être considéré comme du temps de travail effectif.
C’est précisément cette question dont la CJUE a été saisie par un juge espagnol, sur renvoi préjudiciel.
Il s’agissait en l’espèce d’un technicien itinérant, employé par une entreprise d’installation et de maintenance de systèmes de sécurité pour prévenir les intrusions et les cambriolages.
Et la CJUE vient de statuer : elle considère que lorsque des travailleurs n’ont pas de lieu de travail fixe ou habituel, le temps de déplacement que ces travailleurs consacrent aux déplacements quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier clients de leur employeur constitue du temps de travail.
S’agissant d’une décision contraire à notre droit du travail interne actuel, qui considère que ce temps de déplacement quotidien domicile-travail et retour n’est pas du temps de travail, la position de la Cour de cassation sur la question spécifique des temps de déplacement professionnel des salariés itinérants sera certainement très attendue.
Gageons que d’ici à ce que la Haute Cour – ou le législateur – soit amenés à trancher la difficulté, la gestion quotidienne des personnels itinérants ne sera pas facilitée dans les entreprises.
A télécharger : CJUE 10 septembre 2015, n° C-266/14